Pascal Lenoir, maitre de conférences à l’université d’Angers, spécialiste de didactique de l’espagnol.
Enseignant d’espagnol dans le secondaire, c’est à partir de 1994 que Pascal Lenoir partage son temps entre l’enseignement de l’espagnol au Lycée Henri Bergson et la formation d’étudiants et de professeurs stagiaires en espagnol à l’IUFM (Instituts universitaires de formation des maitres) des Pays de la Loire. En 2008, l’IUFM le recrute à temps plein sur un poste de professeur agrégé. Quelques années plus tôt, il décide d’approfondir ses connaissances sur la didactique pour mieux accompagner étudiants et professeurs stagiaires. Il reprend alors des études doctorales qui débouchent, en 2009, sur la soutenance d’une thèse en didactique portant sur l’histoire de l’enseignement de l’espagnol en France entre les années 1970 et aujourd’hui. En 2010 il intègre l’université d’Angers en tant que maitre de conférences où il est notamment chargé d’enseignement auprès des Masters MEEF (Métiers de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Formation) Espagnol. Il intervient également en Licence dans le cadre de l’UEP (Unités d’enseignement préprofessionnels) « Devenir professeur de langue » avec Alexandre Cotteau et Hubertus Bialas [enseignants d’allemand].
La salle d’innovation pédagogique Burgess, située à la Bibliothèque Universitaire (BU) de Belle Beille, a ouvert ses portes en 2017. Parmi les nombreux enseignants qui ont pu utiliser cette salle, Pascal Lenoir, maitre de conférences à l’université d’Angers, a souhaité nous faire part de son expérimentation dans le cadre de deux enseignements : « Initiation à la recherche » (Master MEEF) et l’UEP « Devenir professeur de langue ».
Comment avez-vous eu connaissance de cette salle ?
Tout a commencé au colloque QPES (Questions de Pédagogies dans l’Enseignement Supérieur) en 2017 à Grenoble. Il se trouve que c’est durant ce colloque que j’ai exposé mon problème à Nathalie Lusson [responsable du Lab’UA de l’université d’Angers]. En fait, je devais assurer à la rentrée 2017 un cours sur l’initiation à la recherche pour les 1ères années de Master MEEF. Les maquettes ayant changé, cet enseignement devait commencer dès le 1er semestre. Or un étudiant de 1ère de Master MEEF est énormément préoccupé par son concours. Alors, faire de la recherche en plus, cela me semblait un peu difficile. Je me suis donc demandé comment faire pour leur proposer un cours qui leur permette de faire de la recherche et qui ne leur prenne pas trop de temps par ailleurs. L’idée était donc d’avoir un lieu où se former à la recherche en faisant de la recherche. Au vu de ma demande, Nathalie Lusson m’a tout de suite orienté vers la salle d’innovation pédagogique Burgess qui se situe au sein de la BU de Belle-Beille. Et après avoir visité la salle, je me suis dit « Allons-y ! ».
Justement, qu’est-ce qui vous a encouragé à utiliser la salle Burgess dans le cadre de cet enseignement sur l’initiation à la recherche ?
Il y a la salle en elle-même, sa configuration intérieure, sa modularité aussi, la possibilité de pouvoir partager facilement des documents. Et puis il y a le fait que la salle soit dans la BU. Pour moi, cela était fabuleux, parce que la didactique des langues s’appuie sur d’autres disciplines : les sciences du langage, les sciences de la psychologie, les sciences de l’éducation et les sciences humaines. On doit donc s’alimenter auprès de ces sciences là pour pouvoir nous poser des questions sur notre objet de recherche : enseigner et faire apprendre. Je voulais donc que les étudiants puissent s’initier à ce butinage qu’implique la recherche et qu’ils aillent chercher différentes références pour qu’ils comprennent qu’un enseignant peut nourrir sa réflexion auprès de sources extrêmement diverses.
Concrètement, comment se sont déroulés les cours ?
Une fois que je les avais orientés vers différentes pistes de recherche, les étudiants sortaient de la salle Burgess et allaient chercher les ouvrages dans la BU. Ensuite ils revenaient dans la salle, travaillaient sur des bouts de textes et puis on faisait des validations, ou orales ou écrites, pour voir où ils en étaient dans leur cheminement de recherche. Leur travail final consistait en la réalisation d’une recension de chapitres ou d’articles, selon des normes universitaires, pour montrer en quoi les ouvrages sélectionnés pouvaient les aider dans leur formation.
Est-ce que vous avez eu des retours des étudiants sur l’impact de la salle sur leur cheminement justement ?
Ils se sont très bien sentis dans la salle. L’intérêt qu’ils avaient pour le cours tenait aussi au lieu et à son organisation. Et puis, du point de vue didactique, la salle permet énormément de choses. On arrive vraiment à glisser dans une espèce de continuum : enseigner à apprendre – apprendre à apprendre – montrer comment apprendre – laisser apprendre. En plus, le fait qu’ils se promènent dans la BU leur a permis d’aller dans des rayonnages où ils n’étaient jamais allés. Ils ont profité du cours pour découvrir la BU !
Quels sont vos retours concernant l’utilisation de la salle Burgess dans le cadre de l’UEP « Devenir professeur de langue » ?
Au premier semestre on avait à peu près vingt-cinq étudiants alors qu’au second semestre on en avait plus de quarante ! Et lorsque vous vous retrouvez à quarante étudiants dans la salle Burgess et bien finalement le cours se fait très facilement parce qu’on a une modularité extraordinaire. On passe de séances en petits groupes avec consignes en autonomie à une restitution collective où les étudiants se placent en arc de cercle au centre de la salle. Et cela en quelques secondes !
Selon vous, quel impact peut avoir cette salle concernant la posture de l’enseignant ?
Je pense à une journée de formation sur l’alignement pédagogique que j’ai co-construite avec Nathalie Debski [Vice-présidente déléguée à l’innovation pédagogique] dans cette même salle, et durant laquelle les participants devaient travailler sur des mini-projets. Au moment d’exposer leur travail à tour de rôle sur les tableaux blancs roulants, nous avons vu des enseignants se poser des questions sur leur propre manière de présenter leur travail aux yeux des autres. Ils réfléchissaient à la didactique professionnelle en la pratiquant in situ !
Pourquoi conseilleriez-vous cette salle ?
Je la conseillerais parce qu’elle permet de multiples animations d‘un cours. On peut faire du magistral ou du frontal, passer en mode sous groupe et revenir après en mode magistral. Et tout cela avec une grande fluidité. D’ailleurs je l’ai conseillée à ma collègue Isabelle Cros [enseignante de Français langue étrangère] qui va reprendre le cours d’Initiation à la recherche. Et puis, j’en ai parlé à plusieurs collègues.
Est-ce que vous aviez déjà utilisé d’autres lieux d’innovation pédagogique ?
Oui, je me suis déjà servi de la salle Carmin dans le cadre du compagnonnage1 avec Nathalie Debski. Ce dispositif est fondé sur le partage et le co-cheminement. Il part d’une approche éthique sur la rencontre entre un collègue chevronné et un collègue nouvellement arrivé. On avait donc besoin de croiser ces différents regards. Et pour cela on avait besoin d’un lieu propice à ces échanges (poser des témoignages sur un tableau, les partager avec tout le monde, les commenter ensemble, pouvoir changer rapidement les groupes), ce à quoi ce type de salle répondait parfaitement.
Interview menée par Amandine Fraval (Ingénieure pojet UBL) et rédigée par Lucie Lebeau (Ingénieure pédagogique – Lab’UA)
1 Compagnonnage : le compagnonnage des nouveaux enseignants et enseignants-chercheurs est un dispositif permettant aux enseignants de l’université d’Angers d’être accompagnés par un pair